Yann Genty, 31 ans, gardien de but de handball du Cesson-Rennes
Métropole, a accepté de s'entretenir le Samedi 18 Mai 2013 avec l’administrateur de Les handballeurs de France, groupe de handball
sur Facebook.
Yann
Genty : J’ai commencé le hand à Saint Gratien, dans le Val-d’Oise, à
l’âge de 4 ans et demi. Mon père connaissait un peu les dirigeants, ce
fut plus facile pour m’intégrer au club. J’étais infernal étant jeune,
le hand me permis de m’épanouir mais aussi de faire souffler mes
parents.
Comment peux-tu décrire ton évolution professionnelle, de Saint-Gratien à Cesson ?
Y-G
: Eh bien, c’est vrai que mon parcours a été mouvementé ; au début, à
Saint Gratien, j’ai pu connaitre ce qu’étaient les inter-comités, puis
j’ai été intégré au pôle d’Eaubonne avant de faire Sport Étude pendant
2ans. Je suis ensuite arrivé en tant que 3ème gardien à Villepinte, pour
jouer en D2. Je n’ai pas toujours été gardien de but, j’ai été joueur
jusqu’à mes 16ans, et dû enfiler le rôle de gardien de but au départ
d’Erik Boisse pour les championnats du monde d’escrime. Voilà où j’en
suis aujourd’hui !
Envisagerais-tu un jour de quitter la France pour un club étranger ?
Y-G
: Disons qu’avec ma famille et mes enfants, c’est plutôt difficile.
Quitter une ville pour une autre n’est déjà pas évident, alors quitter
la France pour un autre pays… Si j’avais eu une opportunité très
intéressante, pourquoi pas, je pense que mes proches auraient compris,
surtout si ça aurait été une véritable solution pour moi. Mais je dois
avouer qu’aujourd’hui je suis un peu trop vieux pour quitter la France
pour un club étranger.
Que représenterait pour toi une intégration au groupe de l’équipe de France ?
Y-G
: Ce serait un immense bonheur que de pouvoir jouer en équipe de France
! Je pense que c’est le but ultime de tout joueur professionnel.
Certes, lorsque l’on débute sa carrière, ce n’est pas notre objectif
premier, mais avec un peu plus d’expérience, on peut se mettre à y
rêver. Pour moi ce serait une joie immense que d’être appelé en équipe
de France, surtout avec les grands gardiens qu’il y a en LNH, plus jeune
et surement plus performants. Cela dit, il faut être réaliste,
aujourd’hui j’ai 31ans, je ne suis plus tout jeune, je n’y crois pas
trop.
Comment vois-tu la nouvelle génération de l’équipe de France de Handball ?
Y-G
: Je pense que la nouvelle génération de l’équipe de France peut se
montrer très intéressante. Il faut de bons joueurs et un bon collectif
surtout pour avoir une équipe compétitive. Les jeunes joueurs peuvent
devenir très important en équipe de France.
Peux-tu
dresser un bilan après cette première saison à Cesson-Rennes ? Ton
intégration au groupe, l’environnement sportif de ce club etc…
Y-G
: L’important dans un club, c’est de s’y sentir bien. Il y faut un bon
état d’esprit. A Istres, je n’ai pas connu un aussi bon état d’esprit
qu’à Cesson. Istres était un club assez strict où l’on n’avait pas de
relations amicales avec les coéquipiers, c’était plutôt du genre « on
est là pour le hand, et c’est tout ». A Cesson, on a plutôt un bon
groupe, où l’on peut s’exprimer clairement et franchement avec tout le
monde, et c’est ça que j’aime. Il est important dans une équipe de
pouvoir se dire les choses. On peut dire que le bilan est plutôt positif
car le CRM est le plus petit budget de LNH après Billère mais on arrive
quand même à faire des grosses performances, que ce soit à domicile ou à
l’extérieur. Cesson est un bon club, capable de rivaliser avec les
grandes équipes de D1, et ce sans un budget dépassant les 2 millions
d’euros.
Qu’est-ce que tu penses des investissements Qataris au PSG ?
Y-G
: C’est plutôt très bien. Cela permet au public français de côtoyer des
stars du handball comme Hansen, Abalo… qui sont disponibles après les
matches. Au-delà de ça, c’est plutôt bien pour le championnat français,
les joueurs de LNH peuvent affronter de véritables monstres du handball
avec leur club. Ce qui est bien aussi, c’est de pouvoir remplir les
salles de France, c’est plus attirant de voir des matches avec Hansen ;
les petits clubs sont même amenés à délocaliser leur rencontre dans des
plus grandes salles pour attirer plus de monde et faire plus de
bénéfices. Le championnat devient intéressant grâce à cela.
Est-ce que tu penses que l’hégémonie parisienne est lancée ou qu’elle va s’estomper au fur et à mesure ?
Y-G
: Oh je pense que ça va durer pour le P.S.G. ! Tant qu’il aura les
moyens de pouvoir dominer le championnat comme il l’a fait cette année,
ça va être dur de pouvoir rivaliser avec Paris. Les clubs de LNH peuvent
prendre le pari de rivaliser comme l’a essayé Montpellier, en comptant
sur son centre de formation, mais sinon, sans un gros budget, ça va être
dur d’arrêter le P.S.G.
Est-ce que le résultat d’hier soir face à Saint-Raphaël (28-28),
compte tenu des ambitions du club, est un bon moyen de maintenir le cap
sur la saison à venir ou plutôt une contre-performance à oublier ?
Y-G
: A vrai dire, les deux ! Lorsque l’on concède une victoire dans la
saison en prenant un but à la dernière seconde, c’est dur mais on passe.
Là ça fait le troisième match de la saison où l’on prend un but dans
les dernières secondes. Ça fait mal à force. Maintenant, voilà on a joué
Saint Raphaël qui est un des gros calibres de ce championnat, avec un
fort budget, et qui a déjà rivalisé avec de très grosses équipes. Donc
d’une part on est déçu de ne pas avoir remporté ce match, mais d’un
autre coté on a tout donné et les dirigeants ne nous en veulent pas
vraiment.
On sait que tu aimes bien pronostiquer, quelle
est pour toi l’équipe qui terminera à la 2ème place du championnat de
France de LNH?
Y-G : Franchement, je suis bien
l’évolution du championnat et je pense que Nantes peut finir deuxième,
ils ont un bon calendrier, dont le derby de Bretagne qui s’annonce
intéressant, et ont de bonnes ressources mentales et physiques pour
devenir dauphin du P.S.G. Après, Dunkerque est sur une très bonne lancée
et peut confirmer en conservant sa deuxième place.
Excepté gardien de but, à quel poste aimerais-tu jouer ? Pourquoi ?
Y-G
: J’aimerais bien jouer ailier gauche, parce que j’ai commencé à ce
poste, j’étais efficace au shoot mais ça s’arrêtait là ; pourquoi pas
revenir au poste d’ailier gauche après ma carrière professionnelle.
Lorsque j’étais à Aurillac, on travaillait une combinaison où je prenais
le shoot à l’aile ou alors je faisais une passe. Les défenseurs
laissaient tirer pensant que comme j’étais goal, j’étais une buse au tir
; dommage pour eux, car ça payait ! Aujourd’hui l’entraineur ne
prendrait pas ce risque avec moi, il me trouve vieux et ne souhaite pas
me voir blessé.
Qui est, pour toi, le meilleur gardien de but de handball ? Qu’a-t-il de plus ? Pourquoi est-il si bon à tes yeux ?
- Dans le monde ?
Y-G
: Je pense qu’on est d’accord pour dire que Thierry Omeyer (THW Kiel)
est un modèle. C’est un acharné de travail, tu ne peux pas arriver à son
niveau. Je me suis renseigné, il travaille même pendant les matches,
lorsque son équipe est en attaque, il fait des exercices dans sa cage en
attendant que le danger revienne ! Il est impressionnant. Il est
acharné au travail vidéo également, ce qui lui permet d’être encore plus
performant lors des matches.
- En LNH ?
Y-G
: Je pense que Vincent Gérard (USDK) est le meilleur gardien de LNH,
malgré que son comportement puisse parfois agacer. Il a dans l’ensemble
une bonne attitude dans les buts et fait ce qu’il faut. C’est un grand
bosseur, il est également acharné au travail.
Penses-tu que V. Gérard pourrait prendre la place de n°1 après le départ de T. Omeyer en équipe de France ?
Y-G
: Oui je pense qu’il en a la capacité, après ça dépendra aussi du
coach. Il y a de très bons gardiens en LNH, Mickaël Robin (MAHB) le
prouve cette saison, il est très doué et pour moi fait partie des
gardiens qui peuvent assurer avec les Bleus, devant Dumoulin et Gérard.
Mais aujourd’hui, Vincent Gérard est officiellement le n°2 derrière
Omeyer, c’est sûr.
Est-ce que le mondial 2017 permettra à
l’équipe de France de se montrer plus conquérante du fait que ce
championnat du monde se déroulera en France ?
Y-G : Ça
dépendra de l’équipe sélectionnée à ce moment-là. Elle a de bonnes
chances d’être parmi les favoris en tout cas. C’est une bonne chose que
la France accueille les championnats du monde de handball de 2017, ça
donnera l’occasion au handball de se développer et d’être un peu plus
médiatisé. Les français se mobiliseront pour soutenir la France et ce
sera plutôt bien.
Concernant les « paris truqués », penses-tu que l’ampleur de cette affaire est justifiée ? Pourquoi?
Y-G
: Oui on en parle, du moins on en a parlé. L’ampleur aurait pu être
plus importante. Cette affaire a clairement entaché le handball mais
elle s’est plutôt vite estompée, heureusement. Il y a des choses plus
grave dans la vie que des sois disant paris truqués de joueurs alors
qu’ils gagnent déjà bien leur vie.
Je m’entretiens
aujourd’hui avec toi pour un groupe sur Facebook, Les handballeurs de
France. La majorité relative des membres de ce groupe est assez jeune.
Quels conseils pourrais-tu leur donner quant à leur éventuelle carrière
de handballeurs/euses, en te basant sur ton expérience personnelle ?
Y-G
: Faites pas les cons à l’école ! Je trouve que c’est important de bien
réussir à l’école pour s’assurer de faire quelques choses de sa vie.
Une fois que l’on a assuré à l’école, on peut se consacrer au handball,
pas l’inverse. Je connais un jeune joueur qui avait 19 ans lorsque
j’étais au centre de formation qui s’est blessé gravement et qui n’a pas
pu reprendre sa carrière de joueur. Il n’avait pas vraiment de diplôme
et n’avait pas les mêmes droits (assurance, mutuelle,…) que les joueurs
professionnels. Du coup, sa blessure l’a obligé à reprendre ses études
et arrêter sa carrière. C’est dangereux d’être joueur professionnel, on
ne sait pas ce qui peut nous arriver, il peut se passer n’importe quoi
et c’est fini ; alors mieux vaut être serein et avoir une roue de
secours.
Dans un avenir plus ou moins proche, penses-tu
mettre un terme à ta carrière et te déconnecter du handball, ou
envisages-tu de poursuivre ton activité dans le handball ?
Y-G
: C’est délicat, si je mets un terme à ma carrière et que j’annonce à
mes proches que je me lance dans une carrière d’entraineur, il va
falloir leur faire accepter le fait que je sois de nouveau absent les
weekends mais cette fois-ci pour entrainer ! Ce n’est pas évident, être
entraineur n’est pas facile, on peut voir certains professionnels
arrêter de jouer pour passer entraineur et avoir cette envie de jouer et
de montrer aux joueurs qu’il est encore meilleur qu’eux. Je n’ai pas
envie de ça. Je pense que lorsque j’arrêterais ma carrière, je resterais
dans le handball, mais avec les jeunes, peut être en formation ou en
jeune catégorie.
- Que retiens-tu de ton passage au R.V.V.G. (Réal Villepinte Vert Galant) ?
Y-G
: Ah, disons que c’était très bien, j’ai pu jouer à un niveau
intéressant (D2). J’ai rencontré de très grands joueurs, c’est là où
j’ai réellement commencé à apprendre et c’est important pour moi.
Clairement, à Villepinte, j’ai été éduqué, non seulement dans le
handball mais aussi dans ma vie privée. Le fait de fréquenter des
joueurs de renommé nationale ou internationale m’a été bénéfique.
Propos recueillis par Thomas SAINTE THÉRÈSE, pour Les handballeurs de France.